SOUS LE CHAOS, LA VIE

BENOÎT BARBAGLI

15 octobre - 21 novembre 2021

Vernissage : 14 octobre 18-22h

90° au dessus de nous, 2020, 120 x 65,8 cm

90° au dessus de nous, 2020, 120 x 65,8 cm

Sous le chaos la vie

L’atelier de Benoît Barbagli est vaste. Océan rivière et montagne sont ses espaces performatifs. L’art y surgit, émergence vitale au sein du collectif. Ses propositions plurielles et multi-médiumniques éclosent dans des gestes itinérants. L’art se déplace dans la nature. 

Dans ses dispositifs péripatétiques, le chemin fait sens, la nudité est candide, et l’œuvre se manifeste dans des surgissements. Les configurations sont multiples, les rituels variés et, souvent, l’expédition qui mène à l’expérience artistique se fait avec des plasticiens. Son appareil photo est qualifié de « volant ». Il passe de main en main et la signature est fréquemment partagée ou collective, comme ici avec Aimée Fleury qui cosigne la scénographie. Il l’invite d’ailleurs à exposer certaines de ces œuvres à la Galerie Mansart.

Benoît Barbagli explore les frontières. Il puise dans le substrat de la création en quête de ses germinations issues d’une nourriture mutualisée. La Montagne crée autant que la mer, que l’ami artiste, par sa présence, par son mouvement, par le principe de vie, par essence aléatoire, qui le meut. L’art saisit des instants du Vivant qui se manifeste toujours où on ne l’attend pas, dans des séquences inouïes que nous peinons parfois à saisir dans leurs déploiements. Avec humour, légèreté, force et délicatesse, Barbagli nous invite à croquer les instants et nous incite à les considérer dans leur beauté éphémère. Une ode à la Vitalité.

Les quatre éléments sont récurrents. Ils animent et structurent des séries de l’artiste dans des jaillissements héraclitéens. Le feu, l’eau, l’air, la terre. L’univers de Benoît Barbagli est poétique, polysémique, pudique, drolatique. Il aime à « détourner les références de la culture pour les retourner à la nature. » Qu’est-ce qui fait œuvre ? Le projet ? Ses manifestations ? Il orchestre des rencontres, une communauté se crée autour du projet et l’espace de création devient alors joyeux prétexte à la vie. 

Pour rendre hommage au vivant, lui restituer sa place, l’artiste s’efface, il met en scène, se met en scène et pourtant s’estompe avec beaucoup d’élégance, l’égo se dissout dans l’interconnecté, je est un autre. Benoît Barbagli, c’est le romantisme inversé. Son retour à la nature se fait dans un cadre apaisé où l’égotisme s’anéantit, où l’éloge se dépare de pompe, où l’art affleure dans sa plus simple expression. 

Dans la mer méditerranée en hiver, une main tend un bouquet dans l’eau glacé, la mer féconde est aussi meurtrière ces derniers temps. Éros et Thanatos se rejoignent, ardeur amoureuse et hommage mortuaire sont les deux faces d’un même miroir. Dans une tentative amoureuse au flambeau, un corps nu se jette d’une falaise, tombeau du plongeur ou passion inextinguible ? Le moment est en suspens, espace irrésolu soumis aux projections du regardant. La grâce, la chute et le rebond – ou pas, font partie du tout. Des corps portent une pierre sous la surface troublée d’un lac, émergence d’une nouvelle Atlantide ou perspective sisyphéenne d’un éboulement inévitable après une énième tentative ? L’artiste et ses acolytes apportent leur pierre à l’édifice visuel.

Benoît Barbagli est le sherpa de la montagne, il y transporte ses toiles pour que cette dernière crée. Il éloigne la muséification du corps de la femme en le rendant à la terre. Il capte l’étincelle embrasant le faisceau. Il chemine sur l’anthropocène en interrogeant les étoiles, nées du chaos.

Pulchérie Gadmer

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