THE STOLEN FOREST

FRANYO AATOTH

1 décembre 2016 - 15 janvier 2017
Vernissage : 1 décembre 2016 à partir de 18:00

En collaboration avec la maison de couture KPARGAÏ


Ut pictura poesis

Dans un recueil de réflexions autour de la création artistique, l’Ars Poetica, le poète latin Horace établit une comparaison entre formes d’art différentes dans le but d’en saisir le génie. Une correspondance entre la poésie et la peinture s’installe : ut pictura poesis. Comme la peinture ainsi la poésie. Par le travail attentif de l’écrivain, par son artisanat, la composition écrite parvient à transmettre une impression visuelle chez le spectateur, à engendrer une image intérieure, fruit de la performance créative. Il faut que la poésie ressemble à la peinture : une exigence esthétique que l’on retrouve aussi dans les traditions orientales. Ainsi, le Haïku japonais est construit autour d’une structure formelle codifiée qui prévoit la présence de termes (kigo) évoquant les saisons et la nature : le texte tâche de restituer l’impression du poète et la sensation visuelle d’un paysage. Or, si la poésie et la peinture se lient dans la page de l’écrivain, l’ordre de cette relation parait se renverser sur le support pictural : comme la poésie, ainsi la peinture.

En effet, Franyo Aatoth emprunte son langage à plusieurs formes d’art, relevant toutes de procédés d’écriture. Une écriture calligraphique, comme dans le Lac avec Plantes Différentes, où le détail chromatique se fait signe graphique, alphabet intérieur auquel faire appel dans l’urgence de dire, d’annoncer la destruction de la forêt ; ou bien dans les palettes récupérées, où l’espacement entre les planches rend la composition dramatique rappelant la séparation entre les strophes d’un sonnet qui se met au service de l’énonciation poétique.

A cela s’ajoute une autre écriture, de type photo-graphique : une tendance qui donne un sens global à son œuvre en créant une impression directe et une analogie entre le support et le contenu figuratif.
Comme dans un procédé́ photographique, l’esprit du peintre a été exposé au sujet représenté, c’est-à-dire à la forêt avant et après la rupture d’un équilibre que l’on croyait éternel et durable, d’un tissu émotionnel et biologique auparavant impénétrable, et cette exposition a engendré l’impression dans l’esprit qui est transmise aux supports choisis comme témoins et media.

En cela, la peinture de Franyo Aatoth est analogique, elle refuse la numérisation : le Portrait d’un Incendiaire n’est pas seulement évoqué́ par la couleur et la figuration d’un buste : mais le bois est aussi présent et il montre les traces d’une brûlure, il est inscrit dans la composition comme une relique, de façon directe, analogique. Ainsi, la représentation de la violence des actes subis par la forêt n’est pas prise en charge uniquement par le pigment mais plutôt le choix du support pictural participe à la dramatisation du récit : la peinture s’insinue dans le creux du Kit de Destruction Forestière, elle entre en contact direct avec l’objet.

De manière générale, on établit une plus forte relation entre la forme et le contenu, entre le signifiant (le support) et le signifié (le concept transmis). Les arts primitifs témoignent déjà d’une exigence similaire avec des pierres modelées pour ressembler à un bison ou un cerf, en quête d’une plus forte relation entre l’instrument de l’artiste et la réalité représentée. Un questionnement que poursuivent des artistes comme Fontana ou Burri, intervenant sur l’œuvre jusqu’à la couper ou la brûler.

En littérature, on pourrait entrevoir le même désir chez le poète grec Théocrite, qui donne aux vers de son poème La Syrinx une forme rappelant la flûte de Pan, instrument du poète ; élan que poursuit Apollinaire modelant ses phrases selon les images d’une Cravate ou d’une Montre, symboles du flux irraisonné, du vortex que sait suivre la civilisation occidentale.

En peinture, cela peut correspondre à l’exigence ressentie, par moments, de faire mieux correspondre la toile à la nature, sans solution de continuité. Ainsi pouvons-nous repérer une constante de Théodore Rousseau à Monet jusqu’à Franyo Aatoth : la volonté de faire adhérer la toile à la vie, suivant un crescendo qui culmine chez Aatoth dans la rupture de celle-ci sous le poids du caractère dramatique de la représentation et des enjeux liés à la réflexion sur le monde : les palettes de la Forêt Dérobée, dans leur hyper-signification, miment les sociétés de consommation et leurs mécanismes de destruction programmée. Ainsi, l’œuvre sollicite plusieurs sens et plusieurs personnages à la fois : la peinture se fait sonore, car elle indique le bruit des bûcherons et le bruissement des arbres par des onomatopées, l’odeur de brûlé par le chromatisme de l’Incendie Forestier et du Champs Noir. Souhaitant tout dire, Aatoth lance un appel au spectateur, lui demandant de participer, lui-aussi, à l’acte de création par un choix conscient.

Danilo Lombardo

Expositions individuelles (sélection)

2015 / Galerie Keller - Paris
Institut français - Budapest
2014 / Várfok Galéria XO hall - Budapest
2013 / Herman Ottó Múzeum - Miskolc, Hungary
2012 / Galerie Keller - Paris
Ville de Saint Ouen l'Aumône
2011 / Art Museum - Guangzhou
Academy of Fine Arts - Canton
Maison de l'Europe - Bordeaux
2010 / Let me paint ! performance - Keller Gallery - Paris
Tallinn / Hungarian Institut - Estonia
2009 / La Maison Folie de Moulins - Lille
2008 / Galerie PINXIT - Vichy Várfok Galéria XO terem - Budapest
Galerie Vent d'Est - Bordeaux
Müvészetek Háza (Art Hall) - Miskolc
2007 / Le Quai - Angers - France
Flatfile Galleries - Chicago
2006 / Opéra de Bordeaux - Bordeaux
Galerie Arnizault - Guerlain - Paris
2005 /Comédie de Reims - Reims
Quais des Arts - Bordeaux
2004 / Institut Hongrois de Paris
2002 / Galerie Saint Clar - Sarlat
2000 / Astrolabe - Orléans
1999 / Théâtre Romain Rolland Villejuif
Institut Hongrois de Paris
1998 / Palais de l’UNESCO - Paris
1997 / Galerie Hélène de Roquefeuil - Paris
Institut Français - Budapest
1996 / Musée Arturo Lopez
1995 / Musée Lenine de Kiev - Kiev / Ukraïne
1994 / Galerie Hélène de Roquefeuil - Paris
Génie de la Bastille - Paris
1993 / Galerie Hélène de Roquefeuil - Paris
1990 / Recherches nonfiguratives - St Denis
1989 / Galerie Agnés Stacke - Auvers sur Oise
1988 / Anaïs Gallery - München
1986 / Galerie Ecume - Paris
Antoine Haveloose Gallery - New York
1984 / Anaïs Gallery - München
Fondation Georges Cziffra - Senlis
1983 / Atelier des Maîtres - Paris
1981/ Fondation Deutsche de la Meurthe - Paris
1976 / KFKI Klub Budapest Marczibànyi tér - Budapest
1974 / Vizivàrosi Pince Klub Budapest

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