/_________ /

ESMERALDA KOSMATOPOULOS

4 février - 4 mars 2018
Vernissage : 3 février à partir de 18h

Commissaire : Azad asifovich


Nous sommes heureux de vous convier à la première exposition personnelle de l’artiste new-yorkaise Esmeralda Kosmotopoulos à la Galerie Mansart. /_______/ est un projet d’exposition conçu par l’artiste, en dialogue avec le commissaire d’exposition Azad Asifovich. Leur rencontre s’articule autour de leur étonnement envers la langue française, sa phonétique, et son écriture qui peut être perçue comme un objet avant que le sens ne soit assigné aux mots. L'artiste met en jeu la dialectique du médium et du champ sémantique de l’oeuvre. Comment appréhender voire dépasser la frontière entre langue parlée, écrite, ou lue ? En se ré-appropriant la langue, par son image. En saisissant par la matérialité des œuvres les fonctions temporelles et kinesthésiques de la langue.

​***

Galerie Mansart consacre une exposition personnelle à l’artiste cosmopolite et nomade Esmeralda Kosmotopoulos.

Née en Grèce, elle a étudié à Paris, et désormais elle vit et travaille à New York. Son travail examine la définition et la construction des identités, des souvenirs personnels, de la culture et de l’histoire collective dans une ère post-internet. Elle se définit comme une traductrice, créant des connections entre le passé et le présent, le physique et le virtuel et finalement entre un et autrui.

/_______/ est un projet d’exposition construit en dialogue avec le commissaire Azad Asifovich. Etant tous deux multilingues, l’idée est née de leur constant étonnement envers la langue française , sa phonétique, et son écriture, et nourrie par les textes de Ferdinand de Saussure et de Jacques Derrida. Se plaçant bien avant que du sens soit assigné aux mots, Kosmatopoulos nous invite à appréhender ceux-ci comme de simples objets, à la fois image et son et à regarder quelle influence notre époque post-Internet a sur l’éternelle dialectique entre écrit et parlé. L’exposition questionne la manière dont nous appréhendons voire dépassons au quotidien et sans s’en rendre compte la frontière entre langue orale et écrite, saisissant par la matérialité des œuvres elles-mêmes, les fonctions temporelles et kinesthésiques de la langue.

Le travail de Kosmatopoulos est poli-forme et conceptuel, mêlant dans un même espace drapeaux, texte en néon, plaque de marbre, video et son. Dans la pièce Sans titre, exécutée pour l’exposition /_______/, les lettres en néon blanc forment la phrase « I cannot remember the sound of your voice ». Cette phrase aux tonalités si romantiques tirée d’anciennes lettres d’amour, prend, lorsqu’elle est prise de manière purement littérale aujourd’hui, une forme générique pour devenir une sorte de propriété publique, diffusée et partagée sur les réseaux sociaux; un simple signe de l’émotion et de l’intimité, affiché comme signe et non comme signifiant. L’oeuvre interroge ainsi les différents niveaux de lecture qu’on peut avoir de la phrase, selon son mode de diffusion et son médium. Le néon sert également de clin d’oeil et d’hommage à une génération d’artistes comme Bruce Nauman, Joseph Kosuth, Jung Lee, ou encore Tracy Emin. Il devient un objet critiquant et « objet » critiqué en même temps.

Sound Wave donne à voir une multitude de drapeaux verticaux suspendus du plafond à travers la galerie. L’impression sur nylon leur procure une dimension indicative, banale, voire publicitaire. Un message simple et directe qui devrait inviter tout public à le saisir instantanément. Pourtant ce sont les mains de l’artiste qui y sont photographiées, dont les paumes sont marquées de mots écrits selon les règles de l’alphabet phonétique internationale (IPA). Les sonorités de « différent », « accent » ou encore« barbare » ne correspondent plus à leur visibilité même. Libérées des règles d’orthographes françaises et destituées de toute lettre muette, ces séries de lettres sont souvent incompréhensibles pour la plupart des francophones habitués à reconnaitre le mot par l’image que forment les lettres qui le composent. Mêmes des combinaisons phonétiques telles que « [mo] » ne sont souvent pas comprises, soit que le « t » était précieux, soit que la tautologie instaure une aporie qui empêche de les voir.

Des icônes italiennes de Duccio calculant au millimètre près l’emplacement des mains et les faisant ressortir par un contour soigneusement laissé visible, aux photographies de mains par Louise Bourgeois, l’artiste s’inscrit dans une tradition visuelle qui encense l’organe tactile. Cette fois-ci, la main tente de saisir autre chose, une chose intouchable, le son.

Une autre pièce créée par l'artiste pour l'exposition représente une série de vidéos sur Iphones. Les multiples écritures mal orthographiées du même mot sont lues par le logiciel de la machine qui répète la même prononciation, correcte, du mot. En effet, le programme suit les règles de la phonétique et non de l'orthographe : il ne reconnaît pas les mots, mais nous les fait reconnaître à l'audition. Indépendamment, donc, de leurs orthographes variées et absurdes. Il s'agit d'un autre moyen d'émanciper les sons de leur mise en forme.

La pièce /a/ représente une plaque de marbre sur laquelle est gravée la phrase « La main à la bouche », ou peut-être « La main a la bouche », puisque l’accent sur le « à » est rayé, vandalisé. Présent dans la vie et surtout dans l’enfance grecque de l’artiste, le marbre est un matériau banal, celui des bâtiments publics, et aussi sacré, celui des plaques commémoratives. Le simple fait de retirer l’accent grave du /a/ transforme la préposition “à” en verbe avoir, donnant à la main une relation d’autorité sur la bouche. La main possède la bouche, quand elle l’aide à s’exprimer en indiquant, en schématisant. D’un autre côté, c’est de la main à la bouche que l’humain en est peut-être venu à s’exprimer avec les sons, désignant avant de dire.

​Nous sommes invités à faire le deuil de l’ambiguïté d’une telle origine.

A. Roger Jaffé et A. Voyl

Photo: ESMERALDA KOSMATOPOULOS

Photo: ESMERALDA KOSMATOPOULOS

Précédent
Précédent

KNACKERS

Suivant
Suivant

FORMAL CHARM: VARIATION AND APICAL CELL